Instants d’un futur qui traverse le pont du présent

X – Le vent des caresses

Le chemin du demain
Savait-il encore respirer ?
Il était soudain si étroit
Accidenté.
Où était passé l’espoir ?
Dans la vallée de Chiltral
La source des songes continuait à chanter.
Je me suis mis à courir après le soir
Pressé de s’en aller.
Il avait la couleur de ma soif
Et la chaleur douloureuse
Résignée
Du désir inapaisé.
De l’autre côté de la rivière
Dans les oasis
Émues Suspendues aux falaises infinies
Le soleil et la lumière
Se poursuivaient
Et riaient de se voir nus dans les rizières.
Le vent des caresses
Passait sur leur sourire.
Il avait les dents blanches du soir
Déjà parti.
Tes yeux
Mon amour
Sont-ils des rizières ?
Et ton regard
Est-il le vent qui attend la nuit ?
Sous les mûriers
Sacrés
Où reposent les saisons des Kalash
La petite fille
La main tendue
Vendait ses cages aux merles
Aux ailes blanches
Lampes sonores tressées d’herbes
Pour le jeune voyage de l’espoir
Qui a peur de se perdre.
Les lèvres encore brûlantes de paroles non dites
Mêlée aux lignes transparentes des solitudes
Ma blessure s’est mise à crier ton nom
Sous les platanes sans ombre
Près de la mosquée rose
Où le fleuve est une main de désir
Entre ses rives.
De sommet en sommet
J’entendais courir l’écho de l’absence
Et répondre les cris des grillons
Les appels des étoiles filantes
Que la galaxie
Si proche
Si tendre
A toujours laissé tomber
Pour moi
Sur les rendez-vous de mes enfances.
Alors que je m’étendais en travers du pont
Qui s’en va vers les possibles de l’autre rive
Pour t’obliger à marcher sur mon attente
Le fleuve m’a confié
Avec des mots de silence
Que tu étais déjà passé
Avec ton amour
Ta petite cage d’herbe
Et m’avais laissé pour guide
Le vent du matin
Et ses caresses.

Juillet 1995